pacifisme : loi sur les fusillés

À l’initiative du Groupe de la France Insoumise, la proposition de loi n°4236 « visant à réhabiliter les militaires « fusillés pour l’exemple » durant la Première Guerre Mondiale », a été adoptée en première lecture, le 13 janvier 2022, l’Assemblée nationale sans avoir été modifiée par les députés.

Le 14 janvier la proposition de loi est enregistrée à la Présidence du Sénat dans sa forme initiale.

Elle est, à ce jour, en attente d’inscription à l’ordre du jour.

Le vote doit être confirmé en passant devant le sénat, probablement en juillet. M. Gilbert-Luc Devinaz nous a reçu pour nous indiquer qu’il se trouvait en accord avec le texte de la loi et qu’il s’emploierait à la faire adopter, sans modification. Il s’est porté garant, sauf énorme surprise, du vote du groupe sénatorial PS.

Dans le Rhône, M. Jean-Louis Touraine et Mme Danièle Cazarian sont les deux députés qui nous avaient répondu favorablement.

Cependant la réaction ne désarme pas, même là où on ne l’attend pas, dans des milieux politiques qui se prévalent de valeurs « progressistes ». Ainsi, parmi les réponses reçues, on notera celle de Mme Anne Brugnera au nom de LaREM. Elle laisse pantois, et se conclut ainsi :

« (…) Notre groupe LaREM n'a (…) pas soutenu cette proposition de loi et je tiens à vous en donner les raisons. 

 Si nous sommes favorables à une réhabilitation collective mémorielle, nous pensons néanmoins que cette réhabilitation collective ne doit pas se faire par le domaine législatif. En revanche, nous ne soutenons pas la réhabilitation générale de tous les fusillés de la Première Guerre mondiale. Si la plupart des « fusillés pour l’exemple » ont été condamnés par l’arbitraire d’une justice expéditive, mais ce n’était pas le cas de tous les procès. Certains condamnés l’ont été pour de bonnes raisons comme par exemple celle d'intelligence avec l’ennemi. (Souligné par nous)

 Mon Groupe est toutefois favorable à une réhabilitation individuelle avec étude approfondie du dossier, ainsi qu'à l’étude des demandes d’attribution de la mention Mort pour la France lorsqu’il y a eu réhabilitation après-guerre. »

En somme, on a eu raison de fusiller pour l’exemple ! On n’ose imaginer ce qui se serait passé si des députés de LaREM avaient fait partie des tribunaux d’exception. En fait, il semble que le résultat n’aurait pas été différent.

On aimerait aussi savoir quels ont été les procès réguliers et « non expéditifs » qui ont abouti à des condamnations à mort. Quant au procès en « intelligence avec l’ennemi », accusation qui est la signature de tous les régimes aux abois, qui peut-elle viser en-dehors des cas de « fraternisations » qui signifiaient simplement le refus de partir à l’abattoir ? Enfin, quelles réhabilitations individuelles sont-elles encore possibles en l’absence des pièces disparues, si tant est qu’elles aient existé ? Nous ne sommes plus dans les années 30.

Enfin, il nous semblait que le débat sur la peine de mort avait été réglé en France depuis 40 ans.

Après ce vote, Monsieur le Député de la 3e circonscription du Rhône, le professeur Jean-Louis TOURAINE a bien voulu répondre aux questions de l’AN II.

 

 

 

 

 

INTERVIEW : pacifisme et fin de vie

Monsieur le Professeur Jean-Louis TOURAINE, député du Rhône

 

L’An II : Monsieur le Député Jean-Louis TOURAINE, je vous remercie d’avoir accepté de répondre aux questions de l’AN II après l’adoption en première lecture, par l’Assemblée nationale, de la proposition de loi « visant à réhabiliter les fusillés pour l’exemple durant la Première guerre mondiale ».

Vous aviez bien voulu répondre au courrier que la Fédération du Rhône de la Libre Pensée vous avait adressé, comme à tous les députés du Rhône, à la suite du dépôt de cette proposition.

Ainsi, votre Collaborateur parlementaire, nous indiquait par mail, le 2 décembre 2021 que vous partagez « totalement l'objectif et le principe d'une réhabilitation collective des fusillés pour l'exemple de la Première Guerre Mondiale. Il attend toutefois les débats à l'Assemblée Nationale pour se positionner définitivement sur le texte. Il suivra attentivement les discussions. ».

Quelle analyse faites-vous de ce vote, qui, du point de vue de la Libre Pensée est historique tant il intervient après plus de 100 de bataille pour la Réhabilitation, des enjeux de celui-ci ; alors que devrait intervenir le vote au Sénat ?

 

Jean-Louis TOURAINE : Je me félicite de cette avancée, un peu plus d’un siècle après les événements tragiques. La réhabilitation mémorielle est importante pour les familles des personnes concernées.

Le message adressé aux jeunes générations est également important : se méfier du nationalisme et de l’autoritarisme brutal. 

 

L’An II : Avec votre accord, je saisis cette occasion pour aborder avec vous l’exigence de reconnaissance du Droit à mourir dans la dignité, exigence que la Libre Pensée partage avec vous, et pour laquelle vous et nous agissons, au côté de l’ADMD.

Vous écrivez, à la fin du chapitre « Fin de vie » de votre livre « Donner la vie, choisir sa mort - Pour une bioéthique de liberté », paru en août 2019, chez Érès édition : « Le désir de chacun, devra, à l’avenir, être respecté. Pour cela tous les textes ayant trait aux formes diverses de fin de vie devront être mis en conformité. … La loi à venir sur la fin de vie devra impérativement intégrer cette ouverture à des philosophies diverses, des règles de vie variées, et un sens de la dignité humaine dont les nuances sont nombreuses. »

Vous avez fait enregistrer à la Présidence de l’Assemblée nationale, le mardi 26 janvier 2021, une nouvelle proposition de loi, visant à garantir et renforcer les droits des personnes en fin de vie.

Une telle loi devra répondre à l’aspiration de la très grande majorité des Français, selon des sondages constants depuis des années, puisque plus de 90% d’entre eux (et plus de 70% des médecins) se déclarent favorables à la légalisation de l’euthanasie ou du suicide assisté.

Pouvez-vous pour nos lecteurs, faire le point sur cette bataille, et nous indiquer comment vous analysez les possibilités de la voir aboutir ?

 

Jean-Louis TOURAINE : Le 8 avril 2021, l’article 1er de la proposition de loi sur la fin de vie (article qui introduit le choix libre à une éventuelle aide médicalisée active à mourir en fin de vie) a été adopté par plus de 83% des députés présents ce jour-là. Cette avancée doit maintenant être complétée par le vote des articles suivants puis au Sénat. J’escompte que cette progression bénéfique et inéluctable des droits humains et des malades en fin de vie se déroulera après l’élection présidentielle prochaine.

 

L’AN II : Voulez-vous ajouter quelque chose pour nos lecteurs ?

 

Jean-Louis TOURAINE : Je souhaite seulement les encourager dans leur engagement humaniste, progressiste et en faveur de la liberté des choix.

Propos recueillis pour l’AN II par Xavier HYVERT